Après plusieurs semaines de crise et de confinement, Olivier Colleau, président exécutif de Kiloutou s’exprime sur les différentes mesures auxquelles le groupe a dû faire face et comment il se prépare à la reprise. Le dirigeant préfère également se tourner vers la suite et le monde d’après...

BTP M : Commencons par l’actualité, évidemment, et la crise du Covid-19. Comment celle-ci a impacté le groupe Kiloutou et comment ce dernier a-t-il fait face ?

Olivier Colleau : Dès le 16 mars dernier et l’allocution du Président de la République, nous avons pris la décision de fermer l’ensemble de nos agences pour faire face à la situation et placer ainsi nos équipes et leurs proches en sécurité. Par ailleurs, nous avons voulu nous porter solidaires dans ce contexte de crise sanitaire et d’union sacrée nationale en mettant à disposition tout le matériel dont nous disposions comme des tentes, des moyens de chauffage, des bancs, des tables etc...pour apporter notre soutien au personnel soignant. Au total, ce sont 35 opérations réalisées par le groupe Kiloutou. Un groupe comme Kiloutou se devait aussi d’apporter sa pierre à l’édifice .

BTP M : Plusieurs semaines se sont déjà écoulées depuis le début de la crise, et on se doute que le groupe Kiloutou a déjà envisagé la reprise d’activité d’une manière ou d’une autre ?

Olivier Colleau : Nous avons effectivement préparé le retour de l’activité en travaillant sur nos propres protocoles de sécurité, en vérifiant leur conformité avec le guide de l’OPPBTP de façon à protéger nos équipes à chaque étape de la location : les gestes barrières, la suppression des contacts, la mise en place de drive, la dématérialisation du processus de location et bien évidemment le nettoyage des matériels avant et après l’acte de location. Nous avons partagé avec nos clients les différents protocoles de façon à les inclure dans ce processus. Fort ce cela, nous avons par ailleurs imaginé un plan de réouverture progressif de nos agences. Evidemment, il n’était pas question de penser à réouvrir l’ensemble des agences simultanément mais plutôt par vague : ainsi, 4 agences pilotes ont d’abord été ouvertes pour atteindre à mi-avril un total de 70 agences. A terme, aux alentours de mi-mai, si tout se déroule comme prévu, nous pourrions imaginer, entre 150 et 200 agences opérantes sur l’ensemble du territoire. J’utilise le conditionnel car cela dépendra aussi de la reprise d’activités de nos clients : en effet, l’activité s’est arrêtée à compter du 17 mars et elle reprend timidement .

BTP M : Vous évoquez les professionnels du BTP : comment jugez-vous l’état dans lequel ceux-ci se trouvent aujourd’hui après plusieurs semaines de crise et une activité réduite si ce n’est nulle ?

Olivier Colleau : C’est difficile de donner une réponse unique pour tout le monde. Il faut faire une différence entre les grandes et plus petites entreprises. Ainsi, les discussions que j’ai pu avoir avec les Majors du BTP m‘ont montré qu’ils sont logiquement focalisés sur l’impact du Covid-19 sur les process de traavil de leurs équipes amenées à souvent travailler dans des situations de promiscuité importante. En revanche, la situation est différente pour les artisans et les PME : si la promiscuité des équipes est moins prégnante, la problématique relève plus de la situation financière et économique. En effet, on se retrouve avec des entreprises dont les carnets de commande se sont vidés et dont la trésorerie n’est pas pléthorique.

BTP M : Doit-on craindre des faillites à grande échelle ?

Olivier Colleau : C’est un risque auquel nous pourrions faire face effectivement. J’espère que les aides gouvernementales mises en place pourront aider ces entreprises à sortir de cette crise et à éviter des faillites retentissantes car cela pourrait aussi créer un effet domino pour tout un secteur.

BTP M : Cette crise est aussi mondiale et Kiloutou est un groupe international. Quels sont les impacts de crise sur vos affaires européennes notamment ?

Olivier Colleau : Effectivement, Kiloutou est également présent en Allemagne, en Pologne, en Italie et en Espagne, quatre pays également touchés par le Covid-19. Toutefois, la situation est différente selon ces marchés : En Italie et en Espagne, nous observons des situations semblables à ce que nous traversons en France avec des répercussions identiques sur nos activités. En revanche, c’est différent en Allemagne où une approche de politique de dépistage a été mise en place sans arrêt de l’activité. Ainsi, nous constatons par rapport à une situation "normale", une baisse de 15 à 25 % de nos activités au sein de nos agences.

BTP M : Dans cette situation de crise, inédite mais aussi difficile, avez-vous revu votre politique d’achats de matériels ?

Olivier Colleau : Nous avions initialement prévu en début d’année d’investir 200 millions d’euros en achat de matériels. C’est un investissement que nous ne réaliserons pas. En parfaite collaboration avec nos fournisseurs, nous avons abaissé nos investissements à 125 millions d’euros en respectant certains principes avec nos fournisseurs.

BTP M : Quels furent les résultats du groupe pour l’exercice 2019 et par extension quels sont vos objectifs pour l’année en cours ?

Olivier Colleau : L’exercice 2019 a été une bonne année pour le groupe Kiloutou avec une progression de l’ordre de 7 % et de 4,3 % à périmetre constant pour un CA global de 734 millions d’euros. Nous avons constaté une progression sur l’ensemble des marchés où nous sommes présents avec notamment une politique d’acquisition qui s’est concrétisée avec le rachat de Sticar en Italie et de deux spécialistes de l’élévation en Allemagne. Nous avons ainsi poursuivi notre développement international, volet qui pèse aujourd’hui 16 % de notre activité globale avec une croissance à hauteur de 23 % par an. Quant aux prévisions pour cette année, vous comprendrez, qu’elles ne sont plus d’actualité car le Covid-19 a rebattu complètement les cartes... .

BTP M : Une fois la crise terminée, quels seront les grands axes de développement et les priorités du groupe Kiloutou ?

Olivier Colleau : J’apprécie le fait de terminer sur un aspect positif. J’attache beaucoup d’importance sur l’humain et les liens des personnes au sein d’une entreprise et j’espère que cette crise aura eu pour impact de renforcer ces liens. Le premier objectif sera de retrouver l’ensemble des équipes dans les meilleures dispositions possibles, morales comme physiques. En effet, on pourra toujours échaffauder des stratégies post-crise mais sans les hommes et les femmes dans de bonnes bonnes conditions, rien ne sera possible. C’est d’ailleurs la première leçon de cette crise : identifier les valeurs et les priorités de chacun. Ensuite, je pense que nous reverrons certaines façons de travailler. Je pense notamment à la dématérialisation, au concept de Drive, au télétravail, qui seront autant de conséquences positives et sûrement généralisées dans le monde d’après et notamment dans nos process... Plus globalement, notre stratégie sera la poursuite de nos développements et du chemin de la croissance.