Grégoire Leclercq, Directeur général délégué du Groupe EBP
Tous les baromètres qui se succèdent confirment que le BTP est grippé ! Du gros œuvre en passant par le second œuvre, l’équipement ou encore la construction…Tous les secteurs sont sous tension et suivent un marché de l’immobilier en proie à de grandes difficultés.
Le nombre de logements neufs construits pour les particuliers durant l’été 2023 se situe 16 % en dessous de son niveau moyen des douze mois précédant le premier confinement ! En un an, la situation s’est par ailleurs dégradée. La France a vu s’élever 379.000 logements, soit 150.000 de moins par rapport au douze mois précédents, ce qui représente un recul de 27,9%[1]. Du côté des constructions de locaux non résidentiels, elles occupent 9,5 millions de m². 5,4 millions de m² ont été mis en chantier, en baisse (- 10,7 %) par rapport l’an passé[2].
Priorité à la rénovation énergétique
Le mythe du pavillon avec jardin , construit par des artisans de proximité, a-t-il vécu? Les permis de construire sont-ils plus difficiles à obtenir ? La pression foncière accentue-t-elle la hausse des prix ? Il faut d’abord bien voir que les marges de manœuvre des particuliers se sont restreintes en matière de financement, bien que l’Etat concède à relancer les produits d’épargne encourageant l’immobilier. Cela a pour effet d’inciter 6 propriétaires sur 10 à privilégier des travaux de rénovation énergétique de leur logement actuel, sans penser à en bâtir un autre. Deux arguments guident leur réflexion : les épisodes répétés de fortes chaleurs et l’augmentation des tarifs de l’électricité[3]. Ils regrettent que les aides d’Etat ne soient pas à la hauteur des ambitions climatiques même si le PTZ+ et Ma Prime Rénov’ sont reconduits - trop timidement - dans le Projet de Loi de Finances 2024. Ce qu’il y a cependant de positif c’est que le déficit de main d’œuvre pour la rénovation énergétique et les nouvelles constructions éco-responsables gagnent du terrain si bien que les Français envisagent d’investir ce terrain professionnel pour changer la donne.
Les embûches de la Loi ZAN
Parallèlement, 4 français sur 10 ont envisagé de quitter leur logement actuel pour un autre moins énergivore ou répondant mieux au contexte de transition écologique[4]. Seulement, la loi ZAN ou "zéro artificialisation nette des sols" complique la donne pour la construction de maisons neuves. En effet, d’ici 2050, elle a pour objectif de réduire de moitié la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers. Elle donne par ailleurs plus de maîtrise aux communes dans la gestion de leur foncier. Notamment pour sauvegarder les espaces naturels, renaturer les sols, mettre en valeur le bâti existant et rechercher l’optimisation des espaces urbanisés[5]. Mais de fait, elle bloque aussi les possibilités de constructions individuelles et de surfaces commerciales que l’on surnomme à présent comme faisant partie de la “France moche”. Pour autant, elle laisse un potentiel pour reconquérir les centres-villes à l’immobilier souvent délaissé au profit de la périphérie. Une accalmie semble en revanche se dessiner sur le coût des matériaux, et les trésoreries se redressent un peu du côté des structures de plus de 10 salariés voire plus franchement chez les artisans indépendants. Il faut que l’État soit plus ambitieux et provoque un véritable choc de l’offre pour redresser la barre. Le secteur de la rénovation semble tout désigné et le BTP armé pour y répondre.
[1] Construction de logements neufs à destination des particuliers - Chiffres INSEE - 28/09/23. [2] Construction de locaux : résultats à fin août 2023 (France entière) - Ministère de la Transition Écologique. [3] Sondage Odoxa pour Hellio - La rénovation énergétique : un secteur stratégique pour les Français - 11 septembre 2023. [4] Baromètre de la Fondation pour la Nature et l’Homme réalisé avec ODOXA, du 16 au 24 mai 2023, auprès d’un échantillon représentatif de 3000 personnes [5] Ordre des Architectes - Ce que change la nouvelle loi ZAN