Les lauréats 2024 du Prix "Infrastructures pour la mobilité, biodiversité et paysage" (IMBP) ont été désignés le jeudi 7 mars 2024 par un jury qui s’est prononcé à l’appui d’analyses des dossiers réalisées par le Cerema.
Grand Prix
Le projet « Renaturation d’un ancien délaissé routier sur la commune de Rougé » porté par le Conseil départemental de Loire-Atlantique.
Le Département de Loire-Atlantique a souhaité mettre en oeuvre une nouvelle politique technique, celle de la renaturation de délaissés routiers. Celle-ci s’inscrit dans celle, plus globale, du Zéro Artificialisation Nette (ZAN) portée par la collectivité (qui se traduit par l’abandon de plusieurs projets routiers neufs en vertu de cet objectif de réduire la consommation foncière). L’opération de renaturation du délaissé routier sur la commune de Rougé est le fruit d’une expérimentation, mise en oeuvre en lien étroit avec le Cerema (Direction territoriale Ouest), assistant à maître d’ouvrage sur ce projet. Ce délaissé est, comme beaucoup d’autres, issu d’une rectification de virage (travaux pour rétablir un tracé plus rectiligne de la route et augmenter la sécurité routière). Les espaces de part et d’autre de la nouvelle route, deviennent, par opportunité et au fil du temps, des aires d’arrêts le plus souvent sous-utilisées. Dans le cas présent, ce seul usage ne pouvant justifier ni le maintien de ces surfaces imperméabilisées, ni la non-optimisation des fonctionnalités écologiques que ce délaissé peut générer (espaces verts), le Département a fait le choix de reconsidérer ces espaces afin d’y favoriser la biodiversité.
La renaturation du site de Rougé a fait l’objet des travaux suivants : retrait des tables de pique-nique et poubelles, déconstruction de la majeure partie de la chaussée (recyclage des couches non polluées, rabotage et export de la couche d’enrobé polluée aux Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAP)), maintien de l’empierrement et apport de terre végétale, désimperméabilisation et décompactage des accès riverains, création d’une mare au point le plus bas, plantations d’une trentaine d’arbres, fermeture des accès au site (sauf riverains), coupes de certains arbres. Les résidus de coupes ont été utilisés pour mettre en place un andain. Des suivis faune/ flore sont prévus pour mesurer l’évolution en la matière ainsi que la reprise du milieu.
Mention spéciale du jury « Continuité écologique »
Le projet « Un pont à écureuils » porté par le Conseil Départemental de l’Hérault.
Afin de réduire l’effet fragmentant de ces infrastructures pour la faune sauvage, le Département à travers son Plan Routes et Biodiversité, a engagé une démarche de restauration des corridors écologiques. Celle-ci permet d’améliorer la remontée des signalements de mortalité, de prioriser les secteurs à enjeux et de concevoir des dispositifs adaptés aux contraintes. Ainsi, 7 écuroducs sont actuellement installés sur des routes départementales au 4 coins du département, dont un écuroduc araignée. Un prototype d’écuroduc tunnel est également en phase de test à la Salvetat sur Agout. Et en 2024 un écuroduc sur poteau sera également mis en oeuvre afin de permettre des installations là où les arbres porteurs ne sont pas suffisamment sécurisés.
Mention spéciale du jury « Paysage urbain »
Le projet « Entrée de l’hyper centre-ville du Mans » porté par Le Mans Métropole.
Le vaste quartier situé sous les remparts de la Cité Plantagenêt, de par sa situation en entrée de l’hyper centre a été envahi par un trafic de transit au siècle dernier. Le Mans Métropole a souhaité repenser les espaces publics en redéfinissant le plan de circulation des principales rues de ce quartier en 2016 et en fixant une circulation à 30km/h sur tous les axes réaménagés. L’Agence L’Anton et Associés accompagne la collectivité dans les transformations profondes qu’induisent les choix politiques forts.
Une concertation intense a été mené avec les riverains à travers une dizaine d’ateliers de travail et de co-élaboration en 2018 et 2019. Urbanisé à la fin du XIXème et au début du XXème siècle, ce secteur constitué principalement de « mancelles » (maisons ainsi dénommées et typiques des faubourgs manceaux) présente l’image d’une ville dense et peu élevée. La valeur sociale de ces espaces, leur proximité au centre-ville historique, la vitalité commerçante du quartier méritaient une mise en valeur de haute qualité.
Le projet a permis de créer des espaces publics conviviaux, lieux de rencontres, de promenades, d’échanges en s’appuyant sur l’aspect patrimonial du site. Sur deux places majeures, une avenue, deux boulevards et plusieurs rues, l’installation de circulations douces confortables, la prise en compte des manifestations et des usages temporaires (parade de « Le Mans fait son cirque », Floravril etc.), la création d’une forte présence de nature en ville et la réorganisation des stationnements nécessaires aux riverains et aux usages des commerces ont métamorphosé l’image de ces quartiers. Des noues urbaines multistrates et un square en eau permettent la mise en place d’une végétation abondante et dynamique tout en collectant et réinfiltrant les pluviales et en créant de réels ilots de fraicheur.
Le projet a été livré de 2022 à 2024 sur plusieurs opérations, avec un phasage contraint pour assurer en période de travaux les fonctionnalités urbaines. Le projet a reçu un accueil très favorable, si bien que d’autres quartiers du Mans réclament une telle opération pour eux-mêmes.
Projet prometteur
Le projet « Stratégie de restauration et de suivi de fonctionnalité des continuités écologiques le long du réseau ferré classique en Occitanie » porté par SNCF Réseau.
SNCF Réseau Occitanie a initié en 2018 un programme de restauration des continuités écologiques au sein de ses infrastructures. L’objectif est de réduire le risque de collision des trains avec la faune sauvage, afin de mieux protéger les espèces concernées mais aussi d’améliorer la régularité du trafic ferroviaire.
Sa mise en oeuvre, planifiée sur plusieurs années, repose sur l’usage de technologies de simulation par ordinateur et d’intelligence artificielle. Elle a été confiée à TerrOïko, bureau d’études spécialisé en science des données et développement de logiciels appliqués à la biodiversité.
Après une phase de localisation des « secteurs prioritaires d’intervention » du réseau, c’est-à-dire les zones à plus fort risque de collision, TerrOïko a simulé les dynamiques démographiques et les déplacements de trois espèces (sangliers, chevreuils, cerfs) en sélectionnant cinq tronçons couvrant 500 km de voies, à l’aide de son logiciel SimOïko. Parmi les « points chauds » étudiés, cinq ont fait l’objet d’études approfondies afin de définir les mesures d’aménagements à mettre en place. En parallèle, un outil de mesure et de suivi de l’efficacité de ces aménagements a été développé en lien avec les fédérations de chasseurs.
L’ensemble du dispositif contribue aujourd’hui à la gestion de la biodiversité au sein des emprises ferroviaires et amorce une stratégie de restauration des continuités écologiques. A terme, ce dispositif sera déployé sur l’ensemble du réseau occitan.
Le prix IMBP
Organisé par l’Institut des Routes, des Rues et des Infrastructures pour la Mobilité (IDRRIM) et l’ensemble des signataires de la Convention d’engagement volontaire1 depuis 2010, le Prix IMBP a lieu tous les deux ans. Il récompense les meilleures initiatives prises par les acteurs impliqués à différents niveaux de projets de requalification et d’exploitation des infrastructures de mobilité (conception, construction, gestion, entretien et aménagement). Les infrastructures concernées comprennent les routes, les rues, les voies vertes, les espaces publics urbains, les voies ferrées et fluviales, les ports et les aéroports.