Le gouvernement doit publier d’ici la fin de l’année un nouvel arrêté sur la réduction des nuisances lumineuses. Certaines communes ont pris le problème à bras-le-corps, d’autres s’interrogent encore sur les solutions techniques mises à leur disposition.
La pollution lumineuse, c’est quoi ?
Les nuisances lumineuses ont un impact sur la biodiversité : elles occasionnent éblouissements, pertes de repères et désorientations, créent des pièges écologiques et modifient les rapports entre proies et prédateurs. Tous les groupes biologiques sont concernés. Par exemple, 64% des invertébrés viventpartiellement ou exclusivement la nuit. Elles sont également nocives pour les végétaux, dont le cycle de développement est lié à la lumière. Sans parler des perturbations du sommeil du fait des lumières intrusives dans les habitations, de la modification des paysages nocturnes et de l’impact sur la consommation énergétique.
Un nouvel arrêté début 2019
"Il tiendra compte des différents types d’éclairage : éclairage extérieur, mise en valeur du patrimoine, équipements sportifs, illuminations de façade et éclairages de magasins, parcs de stationnement, éclairage événementiel et éclairage de chantier", précise Natalie Commeau, chef de la mission Bruit et agents physiques au ministère de la Transition écologique. Il prendra également en compte le fait que l’on se situe en agglomération ou hors agglomération, ainsi que les espaces naturels protégés. "Le principe général est de ne pas éclairer avant le coucher du soleil et d’éteindre avant le lever du jour", ajoute-t-elle. D’autres prescriptions visent l’orientation de l’éclairage (vers le sol et non vers le ciel) ou la limitation des éblouissements. La couleur de l’éclairage sera réduite, afin d’en diminuer son importance, et le flux lumineux, encadré, afin d’aller vers un éclairage plus sobre.
De bons élèves
Certaines communes se préoccupent déjà de la réduction des nuisances lumineuses, à l’instar du Parc Naturel Régional Scarpe-Escau dans le Nord. Ce territoire boisé à plus de 25% accueille 55 communes (190 000 habitants) et génère des flux de transport et d’activité importants. "L’éclairage public y impacte une biodiversité encore bien présente. Les villes de Valenciennes, Lille et Douai, notamment, produisent des halos conséquents. L’enjeu est de concilier éclairage public et attention à la faune et la flore", résume Emeric Dumontet, chargé de mission Efficacité énergétique du PNR.
Le parc semble aller dans le bon sens. Il a été lauréat de l’appel à projets TEPCV (Territoire à Énergie Positive pour la Croissance Verte). "Nous avons proposé de ravailler à la constitution d’une « trame noire », dont l’objectif est de conserver les zones de biodiversité et d’y empêcher les effets de l’éclairage public. Nous voulions aussi relier entre elles des zones relativement peu éclairées la nuit pour les sauvegarder et pouvoir valoriser la faune et la flore sur le territoire", poursuit le responsable. 5 communes ont accepté d’expérimenter l’extinction nocturne avec des éclairages spécifiques dans les zones de biodiversité sensible.
La ville de Condé-sur-l’Escaut, qui compte 1 800 points lumineux, a joué le jeu. Avec l’aide de Citéos, elle a opté pour des éclairages d’un blanc très chaud permettant de limiter en partie la nuisance liée à la réduction des ondes bleues. A proximité de l’eau, des luminaires spécifiques ont été choisis, afin de ne pas déborder sur l’eau. Une technologie de détection de présence permet de réduire significativement le gaspilage.
Mise en place de plans lumière
L’un des points de l’arrêté concerne la mise en place de plans lumière. La ville de Montreuil-sous-Bois (93), près de Paris, a élaboré un tel plan "pour réparer et renouveler, embellir la ville et préserver l’environnement". Avec 6 000 points lumineux et 80 armoires électriques à remplacer, Montreuil-sous-Bois (105 000 habitants) a la particulairté de disposer de 3 grands parcs dont l’un abrite un espace Natura 2000 accueillant de nombreux oiseaux. "Nous avons commencé par un diagnostic de l’éclairage puis lancé un plan d’investissement de 12 M€ mis en place sur 8 ans", explique Gaylord Le Chequer, maire adjoint délégué à l’aménagement durable.
Quel calendrier ?
L’arrêté en cours de rédaction suscite plusieurs interrogations dont une liée au calendrier, plutôt serré, alors que les collectivités devront réaliser des diagnostics et lancer des procédures d’appels d’offres avant de réaliser les travaux. "Les actions simples à mettre en œuvre, comme celles consistant notamment à intervenir sur la temporalité de l’éclairage par la mise en place d’une horloge astronomique par exemple, devront s’appliquer dès le 1er janvier 2020, indique Natalie Commeau. Dès lors que les actions à mener sont importantes, l’entrée en vigueur au 1er janvier 2020 ne s’applique plus : les travaux se feront au fil du renouvellement habituel des luminaires". "Le plan lumière permet de déroger à certaines prescriptions techniques, poursuit-elle, à condition d’avoir un effet globalement équivalent. Il sera par exemple possible d’augmenter la température de couleur, si l’on réduit parallèlement l’importance du bleu dans les émissions".