« Il est paradoxal de constater que l’Etat n’a mis que quelques jours à trouver 10 milliards en réponse à la crise des ‘gilets jaunes’ mais a été incapable de pourvoir aux 200 M€ qui manquait en 2018 au budget de l’AFITF », ironise d’emblée Bruno Cavagné, président de la FNTP, à l’occasion d’un point presse de début d’année. Les recettes des amendes radar ayant été très inférieures aux prévisions, ce manque à gagner sur le budget total de 2 445 M€ de l’AFITF n’a toujours pas été comblé. Quant aux possibles recettes issues de la suppression du taux réduit de la TICPE sur le GNR, elles ont fait long feu, à l’instar, jadis, de l’Ecotaxe. « Et nous ne prévoyons pas un retour des discussions autour de cette mesure en raison de l’impopularité qu’elle a suscité à tous les niveaux », croit Bruno Cavagné. En l’absence d’une vignette poids-lourd capable de compenser les pertes, tout porte à croire que les incertitudes persisteront en 2019. « Si le budget de l’AFITF est annoncé en progression dans la loi LOM, soit 2 689 M€, nous ne disposons d’aucune réponse à ce jour concernant son financement puisque son vote, prévu en décembre, a été reporté à la fin du mois de janvier », révèle le président.
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En pratique, 2019 ne se présente pas trop mal. Les investissements des collectivités locales progresseront de 6,3%, la Société du Grand Paris prévoit de dépenser 3,51 milliards d’euros puis environ 4 milliards par an jusqu’en 2022, les grands opérateurs tels que SNCF Réseau, RTE ou Enedis, continuent d’investir, le plan de relance autoroutier de 700 M€ s’apprête à démarrer, et 20 milliards d’euros d’investissements dans le plan France THD sont attendus. « La grande inconnue c’est bien la loi LOM, reprend Bruno Cavagné. Le sentiment d’oubli, de fracture sociale, est toujours très présent et persistera dans les mois à venir. Nous payons 10 ans de sous-investissement. La cohésion des territoires passe aussi par des infrastructures de qualité. Il est urgent d’agir ». Les besoins sont en effet criants. 40% du réseau de canalisations a plus de 40 ans, et le taux moyen de renouvellement des réseaux est de 0,57% pour l’eau potable, et 0,40% pour l’assainissement collectif. 53% des routes nationales sont en mavais état et 48% des ouvrages d’art dégradés. En outre, 11 000 km de voies ferrées ont atteint leur durée de vie maximum (22%) et 45% des installations d’éclairage publi ont plus de 25 ans. Côté THD, 7,5 millions de Français sont encore privés d’un accès à internet.
Agir à trois niveaux
La FNTP prévoit donc un plan d’action, sous la forme d’un grand débat national, qui vise avant toute chose à stimuler l’investissement local. « Il s’agit de redonner des marges de manœuvre aux collectivités en matière de financement et d’expérimentation, de soutenir les plans d’investissements dans les infrastructures à l’image des Assises de l’eau ou des appels à projets, et de faciliter l’accès aux cofinancements en prônant pour une meilleure utilisation des dotations ou une contractualisation Etat/collectivités », poursuit Bruno Cavagné.
En dépit de la menace de report sine die qui plane sur le territoire, la FNTP veut croire à une loi LOM prometteuse. Elle rappelle la nécessité de réintroduire le Conseil d’orientation des infrastructures, d’en enrichir ses missions et de mettre en place une clause de revoyure en 2020 afin de maintenir un niveau d’investissement minimum de 3 md€ par an.
Enfin, il y a également matière à agir à l’échelle européenne. Les élections européennes de mai prochain permettront de rappeler les besoins communs (entretien des infrastructures, grands projets structurants, transitions numérique et écologique). Tout cela à travers de grands programmes européens. 2019 devrait être intéressante.
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