Les dirigeants du groupe SNCF ont lancé le mercredi 29 août la 4e étape de la transformation digitale de l’entreprise depuis le nouveau 574 implanté au cœur du technicentre d’Hellemmes, dans la banlieue lilloise. L’occasion de détailler les enjeux d’une mutation industrielle axée sur le formidable potentiel de l’exploitation des données.
« Les data sont aujourd’hui le nerf de la guerre ! » débute Benoît Tiers, directeur général e. SNCF en préambule de cette journée de présentation d’exemples et réalisations concrètes issues du programme de transformation digitale lancé en 2015 par le groupe ferroviaire. Trois ans déjà que la SNCF collecte et exploite au sein de ses Fabs (1) et autres 574 (cf. encadré) un patrimoine de données exceptionnel dû à la nécessité de tracer à chaque instant son activité ferroviaire : horaires et interventions de maintenance notamment… Deux projets en cours dédiés justement à la maintenance du réseau ferré national nous ont interpellés car ils laissent entrevoir la puissance de frappe des big data et de l’internet industriel des objets (IIoT) sur les 2 fondamentaux de SNCF Réseau que sont la sécurité et la robustesse.
Cartographier en 3D l’ensemble du réseau A l’aide de capteurs placés prochainement sur les trains Surveille – les engins de surveillance et de maintenance du réseau classique mis en place en 2013 dans le cadre du programme Vigirail –, la technologie Lidar va permettre de scanner et de cartographier en 3D l’ensemble des éléments de l’infrastructure (rails, caténaires, signalisation, ouvrage d’art, végétation…) avec une précision de l’ordre de quelques millimètres. A titre d’exemple, cette application réalisera en une heure seulement, les relevés sur 50 km de voies quand il faut 6 semaines aujourd’hui pour les effectuer. Ainsi, au-delà d’améliorer la sécurité des agents en limitant leurs déplacements sur les voies, l’outil contribuera également à la robustesse des circulations et à la performance industrielle de la maintenance. Ce projet s’inscrit plus largement dans la construction d’un jumeau numérique du réseau ferroviaire. « Cette duplication virtuelle de celui-ci est constituée de trois couches » explique Claude Solard, le directeur général délégué à l’Innovation et performance industrielle, « la description physique (x, y, z) de l’objet, la description de l’état des composants, et le mode de fonctionnement des enclenchements ». Cette révolution changera en profondeur les métiers de SNCF Réseau assure le directeur général délégué, car elle permettra de faire passer plus de trains sur une infrastructure donnée, de documenter et piloter toutes les opérations de maintenance sur et depuis une tablette, mais également de former les cheminots sur des cas extrêmes ou encore de réaliser des simulations pour les opérateurs de fret, par exemple, en leur proposant de nouveaux schémas d’exploitation…
Inspecter la géométrie de la voie à bord de trains commerciaux La maintenance prédictive participe à améliorer la robustesse du réseau avec pour preuve le projet Vibrato. « Une innovation qui consiste à utiliser les fonctionnalités du smartphone pour enregistrer les vibrations des roues » explique Michel Morin de la direction technique de SNCF Réseau. Plus précisément, il s’agit donc de récolter les données de vibration géolocalisées via les gyroscopes et accéléromètres inclus dans les smartphones et tablettes qu’embarquent les conducteurs de trains du quotidiens (TER, Transiliens, Intercités). Grâce à ce monitoring en temps réel des vibrations, l’entreprise est ainsi capable d’inspecter la géométrie des voies ferrées et de réaliser, le cas échéant, des opérations ciblées de maintenance, avant que les pannes ne surviennent. Concrètement, Vibrato envoie un fichier de fréquence géolocalisée en temps réel vers une plateforme de traitement et d’exploitation. Ce fichier est alors croisé avec ceux des trains commerciaux passés au même endroit, mais également avec ceux des trains de mesures (autorail UFM 160 et voitures Mauzin) effectuant deux fois par an, des analyses poussées de la géométrie des voies. Si une vibration anormale est confirmée, une équipe est alors envoyée pour inspecter la voie. Cette innovation bénéficie en priorité aux lignes dite du quotidien, car les lignes TGV disposent en effet de moyens d’inspection spécifiques (Rames IRIS 320). « Cet outil prometteur nécessite des ajustements car il nous faut lever certaines incertitudes concernant la géolocalisation et affiner le calibrage de l’accéléromètre e raison de la variabilité des vitesses des trains commerciaux » conclut le responsable.
(1) centres de compétences qui accompagnent les projets digitaux SNCF.
Les 574 Les 574 sont les maisons du digital de la SNCF. Leur nom emblématique vient du record mondial de vitesse sur rails réalisé en 2007. Ces lieux réunissent des équipes projet alliant métiers ferroviaires, experts technologiques, startups et chercheurs. Après Saint-Denis, Toulouse, Nantes et lyon, un 5e 574 vient donc d’ouvrir ses portes à Lille sur le site du Technicentre industriel d’Hellemmes (le plus ancien de la SNCF). Celui étant actuellement en plein transformation pour devenir une Usine du Futur en adoptant les plus hauts standards de l’industrie 4.0.