Le site qui impressionne par son emprise géographique est certains jours battu par de forts vents froids : l’installation de stockage de déchets non dangereux de Satolas-et-Bonce près de Lyon est un site en perpétuelle mutation. Créé en 1972 sous le nom de Sita et géré par Suez ce centre d’enfouissement technique de 71 hectares était autrefois dévolu aux déchets ménagers. Depuis 1983, il est exclusivement dédié aux déchets industriels non dangereux. Depuis son ouverture, 45 hectares ont déjà été exploités et sont aujourd’hui revégétalisés. Reste que le site continue d’accueillir sur quelque 25 hectares pas moins de 300.000 tonnes de déchets par an et qu’il faut continuer de creuser et de terrasser pour pouvoir les accueillir en toute sécurité. C’est à Perrier Terrassement, filiale de Colas, qu’a été confié le chantier de construction d’alvéoles qui représente 500.000 m3 de déblais à travailler. Débutés en juillet 2017, les travaux devaient être livrés en avril 2018. L’extension du centre d’enfouissement consiste en la création de six casiers pour un total de stockage de trois millions de m3 de déchets. Perrier Terrassement s’est allié en groupement pour l’un de ses six casiers qui représentent entre 250 000 et 500.000 m3 de stockage. Le dernier des casiers actuellement en construction représente le volume maximum. Comme pour tous les casiers, le terrassement est opéré avec une pelle de 70 t, du tombereau articulé, ainsi que des bouteurs D6 et D7 pour la mise en remblais. Le fonds de casier est traité à la bentonite avec des matériaux argileux pour l’étanchéité. Le casier est ainsi constitué de trois couches successives : une couche de Bidim, les bâches en elles mêmes, et enfin une autre couche de Bidim sur laquelle est posé du drainant avant le stockage des déchets. Perrier Terrassement est un habitué des lieux puisque depuis plus de vingt ans, il y terrasse pour assurer la création d’alvéoles, au fur et à mesure de l’agrandissement et du site et de sa remise en forme paysagère. C’est aussi l’entreprise Perrier qui est en charge de l’entretien sur l’année, avec des besoins constants de terrassement et de VRD, et des opérations de couverture en remblais des casiers arrivés au maximum de leur capacité de stockage. Création de casiers sur des appels d’offre ponctuels et entretien récurrents et annuels avec des machines plus petites font de Perrier le véritable locataire des lieux et un fin connaisseur des enjeux d’une telle installation de traitement de déchets.
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Et c’est peu dire si les tonnages sont importants puisque le site accueille chaque année pas moins de 300.000 tonnes de remplissage. Le terrassement s’effectue sur des matériaux alluvionnaires avec plusieurs couches de matériaux, à 30 m, voire 40 m de profondeur à certains endroits. Les matériaux sont de facture plutôt correcte et peuvent être valorisés en carrière. De fait, une partie de ces remblais est évacuée en carrière, et une autre partie davantage limoneuse est gardée pour les besoins du site. Mis en stockage, les déchets doivent en effet nécessairement être mélangés à des matériaux afin d’une part de pouvoir circuler à la surface sans danger mais aussi d’autre part pour servir de couverture afin de limiter les envols. Ce mélange de matériaux sert aussi à créer une barrière en cas d’incendie. Le reste des matériaux terrassés qui ne sont pas valorisables sur site ni en carrière servent à faire des digues sur le site ou forment des stocks afin d’alimenter les besoins en terres au fur et à mesure que les déchets se remplissent de déchets. Les terrains du site de Satolas étant relativement plats, le principe consiste à travailler les casiers en profondeur de manière à créer un rendu qui a l’œil ait un modèle plaisant. L’idée de la montagne de déchets, si elle est désormais impensable, serait quoi qu’il arrive impossible étant donné la situation géographique du CET qui se trouve sur le tracé d’atterrissage des avions à l’aéroport proche de Saint-Exupéry. Avec des hauteurs à respecter pour respecter les principes de l’intégration paysagère. La hauteur de remblais est donc due aux contraintes dictées par les autorités aéroportuaires. A cet environnement complexe s’ajoutent les délais, relativement courts pour ce genre d’opération.
Entre 5000 et 8000 m3 terrassés chaque jour
Chaque jour sont ainsi terrassées entre 5000 m3 et 8000 m3 de terres. De gros moyens de terrassement ont dès lors été mis en œuvre par la maitrise d’œuvre, tout l’enjeu consistant à trouver des exutoires pour la valorisation de ces tonnages importants de matériaux évacués du site. Car 5000 m3 de terres, cela représente 10.000 tonnes par jour pour lesquelles il faut trouver un “débouché”. Une carrière capable d’absorber un tel volume n’étant pas légion, Perrier Terrassement joue sur sa très bonne connaissance de la région lyonnaise et son implantation historique pour trouver les installations adéquates. A ce casse tête permanent de trouver les sites d’accueil, Perrier est face à un autre enjeu de taille : la barrière passive. La couche de matériaux située au fond des casiers et qui permet d’assurer l’étanchéité est couverte d’une géomembrane. Percée, cette bâche laissera filtrer les jus de déchets que sont les lixiviats qui pénètreraient aisément dans une éventuelle nappe phréatique située non loin, d’autant plus que les casiers sont creusés dans des matériaux alluvionnaires où l’eau s’infiltre aisément. Le rôle de la couche de matériaux mise en œuvre grâce au terrassement consiste de fait à assurer une seconde étanchéité pour pallier à l’éventualité d’une membrane défectueuse qui entrainerait la pollution des eaux souterraines. Chantier complexe, le site de Satolas l’est à plus d’un titre. Le travail à plus de 30 m de profondeur exige par exemple un phasage au cordeau de la circulation des engins. “Le travail en entonnoir est relativement simple sur la partie supérieure car nous intervenons sur un profil de vaste aire de jeu, commente Pierres-Yves Esparcieux, responsable d’exploitation chez Perrier Terrassement. Mais intervenir en profondeur demande davantage de dextérité pour garantir la productivité des machines. Il faut donc réfléchir à la gestion des eaux car nous intervenons dans un point bas et être capables de nous adapter au fur et à mesure du terrassement. En effet, en fonction des strates et des matériaux trouvés, il faut pouvoir rapidement faire évoluer nos mouvements de terres et notamment dans certains cas trouver de la place supplémentaire à l’intérieur du site pour caser ces surplus. Avec des productivités moyennes de 5000 m3 par jour, il faut donc être très réactifs et gérer l’espace intelligemment”.
Le guidage d’engins, partenaire obligé
Ce scénario, Perrier Terrassement y est habitué, et c’est l’expérience de la filiale de Colas qui a généralement le dernier mot. Car sur 100% des matériaux qui sont extraits, environ un tiers est valorisé en carrière. Tout le challenge consiste donc à bouger des milliers de tonnes de terre pour faire en sorte d’en sortir le moins possible du site afin de limiter le cout financier de cette opération. Le principe consiste donc à modeler au mieux le terrain avec cet excédent. Un véritable jeu de cache-cache pour restreindre au mieux la mise en décharge (de surcroit payante) et réutiliser les matériaux intelligemment dans des dépôts définitifs. Mais Perrier Terrassement qui n’en est pas à son premier chantier complexe a déployé sur place son arme secrète : le guidage d’engins pour garantir la productivité sur le chantier. L’entreprise s’est donc équipée de solutions du fournisseur Sitech qui distribue en France les équipements Trimble. L’ensemble de ces machines de terrassement présentes sur site sont ainsi équipées de systèmes de guidage. A commencer par sa pelle de production Volvo EC 380 E équipée de la toute dernière nouveauté de la marque américaine : la plateforme de guidage Earthworks qui vient il y a quelques mois d’être lancée sur le marché français. Le must : elle permet de transférer automatiquement des données entre l’engin et le bureau. L’opérateur a ainsi toujours en main le projet le plus récent conçu par le géomètre projeteur. Par rapport à la version plus ancienne, elle intègre une nouvelle génération de capteurs sur les éléments amovibles de la machine. Sa mission : donner la bonne altitude au godet qui se met automatiquement à la cote. Sur le chantier de Satolas, la pelle Volvo terrasse 5000 m3 en moyenne de terre. Elle est affectée à faire du talus, mais avec deux obligations : rapidement mais aussi de manière précise. Intégrée à une chaine, elle ne peut retarder le reste du matériel déployé sur site. Si elle est imprécise dans un talus, elle laissera nécessairement une certaine couche de matériaux qu’il faudra revenir chercher avec de plus petits engins. CQFD. “Le guidage d’engins permet de garantir la productivité en se rapprochant au plus près de la cote pour limiter au maximum le travail de finitions, poursuit Pierres-Yves Esparcieux. Si la pelle de production est plus précise, les pelles de finitions travaillent quant à elles différemment. L’implantation de piquets par un manœuvre qui suivait le pelleteur et qui mesurait tout au gabarit du talus est désormais terminée. Le pelleteur est désormais autonome. Il a ses entrées en terre et n’a plus besoin d’aide pour savoir lorsqu’il descend un talus s’il est à la bonne cote ou non”.
La fin du travail ingrat du manœuvre
Le manœuvre au travail ingrat est désormais supprimé. Mais pas seulement. Car c’est aussi le géomètre dont le travail a été modifié. Sa présence sur site quotidienne s’est transformée en une simple visite bimensuelle grâce au guidage d’engins. Résultat : un gain de moyens mis en œuvre sur le chantier. D’autant plus que sans solutions de guidage, une deuxième pelle de finition de 25 t serait nécessaire pour réparer le travail de la pelle de production et corriger ses cotes. Perrier a donc fait ses comptes et ils sont bons : un manœuvre en moins, un topographe moins présent et une pelle supprimée. Au premier intérêt qui est la productivité s’en ajoute un autre : la sécurité. Loin de supprimer des emplois, le guidage d’engins sécurise aussi le travail des salariés sur les chantiers. Car le cauchemar des entrepreneurs, la présence d’hommes à pied sur les chantiers au milieu de machines aux mouvements rapides et aux godets dangereux, est désormais de l’histoire quasi ancienne. Plus d’hommes, c’est plus de risques sur les chantiers. La solution de guidage a donc retenu l’attention de Perrier Terrassement depuis plusieurs années et l’a fait miser sur le 100 % engins connectés. C’est notamment le cas du bouteur D6T XW de Caterpillar qui sur ce chantier a été équipé en solution 3D d’usine. Car le bouteur, tout comme la pelle, a besoin d’entrer en terre. Si la pelle a besoin de savoir où se trouve son godet, le bouteur a pour sa part besoin de savoir en temps réel où se trouve sa lame. A chaque élévation de couche, le bouteur peut avec la solution 3D savoir où il se trouve par rapport à son niveau fini. L’opérateur peut désormais savoir en planimétrie où il se situe par rapport à ses bords de talus. Pour cet engin, la forêt de piquets placés pour guider le bouteur est désormais de l’histoire ancienne.
Des chantiers 100% connectés
Et l’histoire à écrire sera définitivement celle du chantier connecté chez Perrier Terrassement. A tel point que l’entreprise qui gère sur ses chantiers une machine de location sur deux machines en mouvement, pousse ses partenaires locatiers à investir dans des engins équipés de solutions de guidage. Un nivellement vers le haut nécessaire car une pelle non équipée de solutions hi-Tech au milieu d’un dispositif d’engins entièrement connectés est désormais un frein à la productivité d’un chantier auquel l’entreprise ne veut plus être confrontée. Résultat : quatre ou cinq partenaires locatifs du terrassier ont d’ores et déjà passé le cap, confiants que cet investissement est un gage de soutien de leur activité. Un jusqu’au-boutisme de bon aloi puisque Perrier souhaite désormais équiper ses chargeuses de solutions connectées. Et regarde de très près la dernière innovation à la mode : le suivi de productivité qui permet de suivre de manière beaucoup plus précise les volumes de terres transportés par les tombereaux et ceux travaillés par la pelle. Le temps de l’équation tombereaux X cubes sera bientôt de l’histoire ancienne. “La technologie permet de valoriser les métiers du terrassement qui restent peu reconnus dans le BTP, commente Pierres-Yves Esparcieux. C’est aussi une manière d’attirer une nouvelle génération de pelleteurs qui ne sont plus de simples ouvriers qui lèvent de la terre. Une cabine d’engins est aujourd’hui un véritable cockpit d’avion, avec en sus une connexion internet intégrée dans un écran comme dans un bureau. Même l’automobile n’est pas encore arrivée à ce niveau de confort technologique !” Bouger de la terre n’a ainsi jamais été autant à la mode.