L’Union Nationale des Industries de carrières et matériaux de construction (Unicem), qui s’était déjà étonnée du flou entourant la future filière de Responsabilité Élargie du Producteur (REP) il y a quelques semaines, dénonce les conclusions de l’étude de préfiguration réalisée très récemment par l’Ademe, à la demande du Gouvernement.
"Le projet d’application de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) ignore à la fois la qualité des résultats obtenus et la réalité du fonctionnement de la filière minérale en matière d’économie circulaire. Le risque est de créer un gigantesque et coûteux dispositif administratif, totalement éloigné du terrain et des réalités des chantiers", souligne . Christophe Jozon, Président de la Commission Économie circulaire de l’Unicem. Conscients de leurs obligations et de leur rôle dans la préservation des ressources naturelles, les adhérents de l’Unicem se sont engagés depuis de nombreuses années avec leurs partenaires, dont les entreprises de travaux publics routiers regroupées au sein de Routes de France et les entreprises de déconstruction affiliées au SEDDRe, dans des démarches responsables afin de gérer durablement et de façon raisonnée les ressources, dans une logique de circuit court et d’économie circulaire. Les déchets inertes du bâtiment issus des matériaux minéraux bénéficient ainsi, depuis plus de 25 ans, d’une filière de reprise et traitement permettant une valorisation des déchets à hauteur de 76 %. Un taux très élevé atteint grâce, notamment, aux 1 500 sites qui maillent l’ensemble du territoire auxquels s’ajoutent 471 usines d’enrobés qui recyclent 76 % du stock des agrégats récupérés sur les chantiers routiers, et à une expertise reconnue.
La menace de déstabiliser une filière parfaitement organisée
Malgré les excellents résultats obtenus par la filière de recyclage du secteur, le Gouvernement vise à soumettre les déchets inertes (déchets minéraux issus des activités de construction et démolition) du bâtiment à la REP. Il prévoit, en particulier, la gratuité de la reprise des déchets de la construction et de la déconstruction sur les chantiers dont le financement serait assuré par le paiement d’une éco contribution par les metteurs sur le marché. "La menace est réelle de déstabiliser une filière parfaitement organisée et de conduire à une ponction économique très importante de ses acteurs", ajoute Christophe Jozon. En effet, l’Unicem s’inquiète de la complexité et du coût du dispositif administratif à créer pour synchroniser la multitude de flux physiques (33 millions de tonnes de déchets) et financiers (près de 700 millions d’euros) et surtout de la déconnexion, du non-sens, de cette approche avec les réalités du terrain et des chantiers. "L’industrie des carrières et matériaux regrette profondément de ne pas être écoutée et déplore le manque de considération pour une filière mature et responsable. Les conclusions de l’Ademe ignorent le réseau de 1 500 points de collecte de déchets inertes, ce qui pourrait, en outre, menacer la pérennité de nombreux sites avec de graves conséquences sur des emplois, majoritairement situés en zones rurale et péri-urbaine".
Un diagnostic erroné
L’Unicem et ses partenaires s’interrogent également sur le fondement même de cette REP et sur la vision du Gouvernement qui présente la reprise gratuite des déchets de produits et matériaux de construction comme la solution afin de réduire le nombre de dépôts sauvages. "Un diagnostic erroné pour l’industrie des carrières et matériaux qui considère que les dépôts sauvages sont principalement le fait de particuliers ou d’entrepreneurs peu scrupuleux ou exerçant leurs activités dans des conditions illégales (travail dissimulé) et non des professionnels du secteur". Par ailleurs, l’Unicem met en place des actions concrètes pour lutter contre les décharges sauvages et elle se tient à la disposition des pouvoirs publics pour les rappeler au besoin. "Au regard de ces différents points, l’Unicem sollicite le Gouvernement pour la mise en place d’une concertation réelle et sérieuse avec tous les acteurs dont Routes de France et le SEDDRe et demande, en premier lieu, le retrait des déchets inertes du périmètre de la REP", conclut C. Jozon, " tout changement dans le recyclage des déchets inertes du bâtiment mérite d’être étudié dans le détail et en concertation avec les entreprises concernées. En effet, la filière, qui permet aujourd’hui à la France d’atteindre une excellente performance environnementale en termes de recyclage des déchets inertes au-delà des objectifs fixés par l’Europe, s’est construite ces 25 dernières années grâce à la seule volonté de ses industriels, convaincus de la nécessité de préserver les ressources minérales naturelles non renouvelables".