Avec 3,65 milliards d’euros de CA à fin 2024, en repli de -7,9%, les industriels du BTP, membres de la fédération Evolis, ne prévoient pas de dynamique de croissance. « Dans un contexte économique et industriel délicat », ils prédisent plutôt une stagnation de l’activité, d’autant que l’indicateur de production d’Evolis est annoncé en recul de -4,5% en 2025 (vs -3% en 2024). Le scénario n’est pas catastrophique si l’on considère que le niveau de l’activité étant resté haut ces dernières années, moins l’année particulière du Covid. L’optimisme des adhérents, s’il est encore présent, est modéré. « Ils sont sensibles au contexte politique et géopolitique qui suscitent à la fois de l’interrogation et de l’attentisme. Des projets sont bien en cours mais les décisions tardent », explique Rudolph Ganzel, directeur du pôle économique d’Evolis.
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Avec le marasme politique français actuel – l’absence d’une loi de finances 2025 et la nouvelle taxe sur les entreprises annoncée afin de combler le déficit public abyssal – les industriels confortent leur stratégie à l’export. En 2024, ils exportaient largement leur production en UE, et particulièrement en Allemagne, « à la fois 1er client et 1er fournisseur ». « La part de l’export a été également plus importante aux États-Unis, qui passent à la 2nde place. L’Italie arrive quant à elle 3e », souligne Rudolph Ganzel. Décidés à « être le plus possible à l’international », les industriels ne sont pas moins conscients que les mesures de protectionnisme amorcées par Joe Biden et enfoncées au maillet par Donald Trump peuvent « représenter un risque pour le Made in France ». Une partie de la solution semble avoir été trouvée : ils sont beaucoup à avoir implanté leurs usines aux Etats-Unis. « La réponse à cette menace sera de produire localement, affirme Fabien Vincentz, président d’Evolis. Les risques de plus long terme sont davantage identifiés en UE, où le CBAM va surenchérir le coût de nos produits face à la concurrence internationale. Nos espoirs résident dans la boussole de compétitivité pour laquelle une simplification réglementaire est espérée ». « Il n’existe pas de gouvernance en UE, l’instabilité est partout, déclare quant à lui Jean-Claude Fayat, président du groupe Fayat et président sortant d’Evolis. À cela, on ajoute un constat français : le PIB par habitant diverge depuis 15 ans par rapport aux États-Unis, et nous sommes parmi les pays les moins productifs en Europe ».
« Une vraie politique de l’offre »
Autre sujet d’inquiétude (évoqué par 12% des adhérents) : des importations marquées par « l’arrivée massive de produits d’origine chinoise. L’Empire du Milieu s’est d’ailleurs hissé à la 3e place en 2024 dans le domaine de la robotique avec des différences de prix de 70% », précise Fabien Vincentz. Alors que les industriels appellent à « une prise de conscience et une forme de préférence nationale aux produits fabriqués de façon vertueuse », Jean-Claude Fayat réclame quant à lui une « véritable politique de l’offre » vouée à accompagner les industriels dans l’adoption des nouvelles technologies. « Nous devons réagir politiquement et de façon réglementaire avec une vision européenne car il est impossible de raisonner par pays. La mondialisation est terminée, nous faisons dorénavant face à une régionalisation du monde avec différentes masses économiques », estime le dirigeant qui destine à ce jour 90% de sa production de machines TP à l’export, et réalise 20% de son CA aux États-Unis.
Des raisons d’espérer
Il se passera encore au moins une année avant que le bâtiment n’amorce une timide remontée. Aussi, une amélioration, dans l’immédiat, n’est pas envisagée, en dépit de la poursuite de la baisse des taux d’intérêt. Pourtant, il existe bien des raisons de rester optimiste. Les secteurs de l’automobile (corrélée au TP), du nucléaire (dont la production décarbonée intéresse de près les industriels), de l’aéronautique et de la défense progressent dans une bonne dynamique, qui esquisse une année 2025 bien orientée en matière notamment de transition énergétique. « Dans le matériel, on constate un allongement de la durée de vie. Les clients ont une vraie volonté de maintenir leurs parcs, poursuit Rudolph Ganzel. La demande en pièces de rechange, en composants, et en SAV, soutiendra vraisemblablement le CA des industriels ». Dans le registre de la relance de l’investissement, Evolis pousse à la reconduite du dispositif de suramortissement « qui avait grandement supporté l’investissement productif. Soutenu dans le temps, il assure un avantage compétitif certain ».
Evolis c’est :
21 milliards d’euros de CA
400 usines
86 000 salariés